Grimpette et Dégringolade de Pente : Huayna Potosi et El Choro !

Du 3 au 9 Avril 2013

Passage au dessus de 6000m !

Ce matin, vers 9h, nous sommes au rendez-vous devant l’agence et partons au dépôt afin de récupérer tout le matériel nécessaire pour l’ascension et pour le trek
dans la jungle qui suivra. Nous essayons tout le matos (pantalon, polaire, veste, gants, chaussures plastiques, crampons, piolet, baudrier, duvet, tente…), un peu désuet, et ressemblons à un mixe entre un cosmonaute et un agent de la DDE… nous sommes prêts ! Puis nous filons vers le refuge de l’agence à 4700m d’altitude et admirons au passage les hauteurs de La
Paz quand nous passons par El Alto, banlieue de la capitale (ici, c’est inversé, il faut monter pour descendre dans les bas quartiers : les riches sont en bas, les pauvres en haut…conditions climatiques obligent !). Pendant le trajet, nous faisons la connaissance de nos deux compagnons de cordées, Manon et Pierre, des stéphanois baroudeurs. Nous découvrons quelques jolis lacs aux couleurs étonnantes en bordure de route ainsi qu’un grand cimetière ; « ceux qui n’ont pas atteint le sommet », nous précise notre guide sur un ton blagueur… Puis il faudra faire fuir un troupeau de lamas qui nous barre la route pour atteindre le refuge. Après un bon déjeuner, nous nous équipons de tout le matos, et filons sur le glacier, à environ 4900m d’altitude, pour quelques heures d’entraînement à la marche avec crampons et même à la cascade de glace. Nous ne sommes pas très rassurés par l’encadrement des guides qui ne prennent même pas la peine de nous encorder dans les passages difficiles, le tout sans casque… Tout se passe bien malgré tout, nous sommes près pour l’ascension, mais nous sentons que ça ne va pas être simple avec les guides. Après encore un excellent repas par la cuisinière du refuge, nous flânons quelques instants auprès du feu – ça meule sévère ! – mais nous ne tardons pas à nous coucher car la prochaine nuit sera courte.


Entrainement périlleux sur le glacier…

Au réveil, personne ne souffre du mal aigu des montagnes, mais la nuit a été difficile pour la plupart ; altitude, froid et stress ne font pas bon ménage avec le sommeil ! En début d’aprèm nous partons en direction du camp de base
alto, un autre refuge, plus sommaire, à 5300m d’altitude. En chemin nous payons 10Bs de droit d’entrée à des mamies paumées au milieu de nulle part dans la montagne, nous leur offrons des feuilles de coca pour compatir à leur peine. Elles se jettent dessus, comme à chaque fois que nous proposons les feuilles magiques ! Nous grimpons les 600m de dénivelée, dans un pierrier la majeure partie du temps, en 3h. La respiration est courte, les sacs avec tout le matos sont lourds, mais nous sommes récompensés par la superbe vue depuis le refuge. Ensuite, nous enchainons par un léger souper, à 18h, et nous sautons dans le page tout de suite après !


Coucher de soleil depuis le camp Alto.

Cette nuit sera encore pire que la précédente, certains ne fermeront pas l’œil (pourtant il fait bon, nous nous tenons chaud les uns contre les autres) ! Toute l’équipe est debout peu après minuit, nous déjeunons et nous équipons pour la montée finale, les frontales vissées sur la tête ! Nous nous élançons à trois cordées – une par couple -, crampons aux pieds dans la neige, à 2h du mat’. Nous évoluons dans la nuit, pas à pas, le souffle court, très lentement mais les groupes se distancent. Les ZOBS en tête, menés par « Mr Blagues », doivent le freiner à plusieurs reprises pour garder leur rythme. Peu après le départ, la pente s’élève brutalement, et il faudra escalader la paroi neigeuse sur quelques dizaines de mètres dans l’obscurité. Arrivés vers 5800m nous attendons les deux autres groupes pour faire un point et constatons qu’il manque Manon à l’appel, trop pressée par le guide elle s’est sentie mal et à dû rebrousser chemin avec lui. Nous sommes maintenant à 2 cordées, et sommes rejoints par Pierre dans la notre. Les choses se compliquent, le froid se fait vraiment sentir, les pieds et les mains sont quasiment gelés ; ça fait maintenant près de 4h que nous marchons. Nous sommes maintenant à 6000m d’altitude, face à nous même c’est le moment de vérité : les 88 derniers mètres nous séparant du sommet sont les plus difficiles, il faut être d’attaque. Mr Blague se met à nous gueuler dessus en nous disant que nous sommes trois sur la cordée, que c’est très dangereux car nous devons franchir une crête vertigineuse où il ne faut surtout pas s’arrêter. La pression est à son maximum, nous nous élançons sans penser et continuons notre progression à l’aide du piolet, comme des machines. Enfin, une demi-heure plus tard, nous atteignons notre but, 6088m, synchro pour le lever du soleil ! La vue du sommet et vraiment splendide : mer de nuage, lac Titicaca, La Paz, Cordillera Real, Sajama et autres sommets… Nous en profitons peu car nous sommes gelés et la place sur le sommet est comptée ; il faut déguerpir avant que d’autres cordées arrivent sur la crête, ce serait là encore trop dangereux. Nous repartons un peu frustrés, pas trop le temps de réaliser et de prendre des photos, mais nous imprimons bien cet instant dans nos mémoires ! Nous sommes heureux, fatigués, mais heureux de notre nouveau record !


6088m ?!

La descente tout aussi périlleuse se fait sous un beau soleil en environ 2h. Nous réalisons le chemin parcouru de nuit et découvrons les superbes paysages, maintenant que le jour est levé. De retour au camp de base alto à peu près réchauffés, nous mangeons un bout vite fait, plions nos duvets et repartons sur le champ, pressés par les guides. S’ensuit encore 2 longues heures de descente dans le pierrier, le sac pesant de plus en plus lourd. Vers 11h30, nous sommes de retour au refuge, exténués mais fiers de notre exploit. Maintenant, nous n’avons plus que des idées fixes : manger, se doucher et siester ! Nous quittons Manon et Pierre (bonne route les amis, encore une belle rencontre et que le vayan bien !) et encourageons un nouveau groupe qui part demain pour le sommet.


Vue depuis le refuge Huayna Potosi à 4700m.

Le lendemain, après une bonne nuit de récup’, c’est journée farniente : petite balade de décrassage, sieste et jeux de cartes au programme. Nous profitons des repas gargantuesques servis par la cuisinière du refuge et du calme des lieux. En fin de matinée, nous retrouvons peu à peu le groupe de la veille et constatons que sur les 7 participants, un seul est parvenu au sommet… Apparemment l’ambiance n’y était pas dans leur groupe… no comment ! Lors de cette journée de repos nous faisons connaissance avec l’atypique Dr Hugo qui aurait croisé le Che et escaladé tous les sommets de la région. Nous lui demandons au passage où en est l’organisation du trek car nous partons le lendemain (tôt apparemment), mais nous n’aurons pas d’autres information, Dr Hugo restera évasif, nous verrons bien !


Journée repos au refuge.

 

 

Conclusion sur nos trois jours d’ascension et sur l’agence Huayna Potosi Tour, Agencia De Viajes Y Turismo : nous sommes globalement satisfaits de notre aventure, car tout s’est bien passé pour nous (à part pour Manon qui a été bousculée-découragée par son guide). Les refuges et la nourriture étaient au top, mais nous émettons un gros bémol sur l’encadrement des guides. Après discussion avec d’autres et de ce que nous avons pu voir durant ces quelques jours au refuge, l’organisation est très variable. Certains ont des casques, d’autres passent des « visitent médicales » avant l’ascension et d’autres ont des guides encourageants qui savent s’adapter au rythme des andinistes novices… Nous déconseillons donc les guides Feliciano (Mr Blagues) et Luis.

Passage en dessous de 2000m !

Nous sommes levés aux aurores car apparemment nous devrions partir vers 7h, mais finalement nous ne partirons qu’à 8h30… Nous nous élançons sur les chemins vertigineux au départ du refuge avec Sabino et ses deux fils de 18 et 12 ans ! Nous passons un col à 5000m d’altitude et redescendons ensuite dans un brouillard à couper au couteau jusqu’à la pause de midi sur un plateau. Nous payons un droit d’entrée de 20Bs dans le village d’Achura. Le reste de la journée, nous suivrons le chemin des Incas del Choro qui ne fera que dévaler la pente jusqu’au camping Challapampa à 2800m d’altitude. Nous traversons plusieurs villages typiques tout au long du parcours, le temps semble s’y être arrêté. 8h de marche, 2200m de dénivelée négatif pour aujourd’hui, bonjour les articulations ! Nous avons quand même de la chance avec la météo, nous n’avons eu que quelques gouttes de pluie. Nous montons les tentes et savourons un bon goûter d’abord et un excellent diner ensuite, préparé en quelques minutes par Sabino. En plus d’être un guide prévenant et très aimable, c’est un bon cuistot !


Mieux vaut ne pas trébucher…

L’équipe se lève tôt encore une fois car nous avons 9h de marche devant nous pour atteindre le campement de La Casa Japones ou 6h si nous sommes trop nazes. Dès le début de la rando nous évoluons dans une végétation bien plus dense, c’est la jungle ! Arrivés au Choro (endroit où deux cours d’eau se rencontrent en langue Aymara) nous devons traverser un pont de singe vertigineux. Puis remontons jusqu’à un autre campement où nous prendrons le déjeuner (royal à base milanesa, pâtes et crudités…) avec une vue superbe ! À ce moment là le guide nous explique qu’il sera difficile d’atteindre la maison du japonais, nous nous arrêterons donc 3h plus tôt pour ne pas marcher de nuit et finir sur les rotules… Ensuite, le sentier court à flanc de montagne avec la rivière en contrebas. En cette saison, il est magnifiquement fleuri, le tout donne un admirable tableau. Le soir, au camping vers 2200m d’altitude, nous ne faisons pas de vieux os, après le diner aux chandelles en compagnie de dizaines de lucioles, nous filons directement sous la tente. Sabino nous averti de bien rentrer nos affaires dans la tente car, dans la nuit, des mineurs se rendent aux mines d’or croisées un peu plus tôt… De toute façon, il pleuvra toute la nuit, les affaires sont mieux au chaud avec nous.


Paysages fleuris le long du chemin.

Nous nous levons avant l’aube car encore 6h de route nous attend aujourd’hui et un minibus doit passer en début d’après-midi pour nous emmener à Coroico. Aujourd’hui, nous aurons moins de chance que les jours précédents car la pluie nous accompagnera une bonne partie du temps, rendant le chemin extrêmement boueux, voir dangereux. La végétation de plus en plus dense nous épargnera d’arriver trempés jusqu’aux os ! Nous arrivons à la casa Japones à Sandillani dans les temps, où nous faisons la connaissance de l’atypique japonais Tamiji Hanamura. L’ermite a 88 ans, il habite les lieux depuis plus de 50ans. Personne ne sait pourquoi ni comment il est arrivé là, maintenant il tient le registre des visiteurs. Lorsque nous lui disons que nous venons de Grenoble, il a plaisir à nous sortir une carte postale d’une vue de grenoble, envoyée par les premiers français à être passés par là. Il nous conte ensuite son voyage depuis le Japon jusqu’en Bolivie à l’aide d’une mappemonde d’un vieux guide « relais et châteaux ». On ne peut plus l’arrêter mais il nous faut quand même repartir, il nous reste environ 3h de marche. Nous parvenons finalement au terme de notre balade à Chairo (1400m d’altitude), exténués. Après le repas une navette nous emmène à Coroico à environ une heure de route de là, où nous remercions et saluons Sabino et ses fils. Nous avons trouvé ce trek splendide, mais plus physique que ce que nous pensions. Nous avons un peu sous-estimé la difficulté, pensant « qu’il n’y avait qu’à descendre » et oubliant trop vite les efforts fournis lors du Huayna. Dégringoler la pente, ça crève quand même, mais ça vaut le coup ! Le soir pour « penser nos blessures » et fêter « notre 6000 », nous nous payons un bon resto : raclette pour les LetS, fondue de fromage (ce serait abusé de dire savoyarde…) pour les ZOBS (encore une) ! Nous déboucherons également une petite bouteille de « champagne », du cidre en fait, sur le toit de notre hôtel car Laure et Simon repartent demain pour La Paz. Un mois de voyage ensemble ça se fête ! Merci pour tous ces bons moments partagés, c’était chouette, à bientôt en France ou ailleurs !


Épuisés mais ravis !

 

 

Brèves de voyage :

Une randonneuse allemande : « Le Dr Hugo m’a déconseillé de faire l’ascension en 2j/1n, mais plutôt 3j/2n et aussi il m’a « prescrit » du Diamox… »

Nous : « Alors, ça a marché ? »

Elle : « Pas vraiment je suis la seule à avoir été malade ! »

Feliciano, aka Mr Blagues : « Si vous aimez et respectez la montagne, la montagne vous le rendra… Vous avez compris les cabrones (connards) ? »

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